Jusqu’en 2016, au sein du cabinet Imfusio, le niveau de rémunération des collaborateurs relevait d’une décision des fondateurs sans pour autant suivre une politique claire d’attribution. Et ça, ça n’amusait pas vraiment les collaborateurs, ni Yaël, l’un des trois fondateurs, qui avait envie depuis toujours que chacun puisse déterminer lui-même son propre salaire. Voyant que les différences – connues de tous – n’étaient pas forcément justifiées, la décision a donc été prise de mettre la question du processus de rémunération entre les mains du collectif…
Chez Imfusio, la transparence des salaires est une évidence et existe depuis la création de l’entreprise, en 2005. Tous les salariés peuvent accéder aux bulletins de paie de leurs collègues, y compris ceux des associés fondateurs. Ces bulletins sont tout simplement accessibles sur un répertoire ouvert à tous !
En 2016, une nouvelle étape est franchie, avec le souhait impulsé par Yaël de repenser ensemble le modèle de rémunération d’Imfusio.
L’argent doit être une conversation dans l’entreprise - Yaël, co-fondateur d'Imfusio
La première tentative est audacieuse : une réunion est organisée pour que chaque collaborateur puisse exprimer son niveau de salaire idéal. La seule consigne, fournir des explications sans pour autant tomber dans la justification. Sur le papier, c’est une belle idée. Mais lors de la réunion, le ton monte et les échanges révèlent des ressentis négatifs par rapport aux niveaux de rémunération existants.
Suite à plusieurs discussions difficiles, les « Imfusiens » prennent la décision d’homogénéiser la rémunération, en attribuant le même niveau de salaire pour des profils similaires. Cette seconde tentative ne les convainc pas vraiment et ils actent ensemble que ça ne sera que temporaire. La réflexion ne fait que commencer.
Les Imfusiens réalisent en effet que jouer « les apprentis sorciers » sur un sujet comme la rémunération peut être dangereux, car le rapport à l’argent n’est pas neutre et touche à des aspects très personnels (personnalité, croyances, convictions, aspirations…).
Imfusio décide alors de faire appel à un expert de la question, Christian Junod. Cet ancien banquier (« repenti », nous dit-on) est notamment l’auteur du livre Ce que l’argent dit de nous.
Il accompagne les Imfusiens dans le cadre d’un séminaire et de séances de coaching individuel, pour les aider à décrypter leurs rapports à l’argent et réussir à en discuter librement. Le séminaire est aux yeux des Imfusiens un « moment de grâce collective », qui leur inspire la création du concept de « rémunération en conscience », renommé depuis « reconnaissance en conscience ».
Comment cela fonctionne ? Tous les trimestres, se déroule le rituel de la « reconnaissance en conscience » au cours duquel chaque Imfusien décide de son niveau de salaire, l’organisation de son temps de travail, ses avantages en nature, formations selon un processus bien établi. Cette décision doit être prise « en conscience » : en conscience de ses besoins individuels, de la situation de l’entreprise, des besoins des autres, etc.
Le processus de « reconnaissance en conscience », orchestré par un collaborateur dit « gardien », respecte un cadre précis :
- En amont, les informations clés sont transmises à tous : salaire actuel de chacun et évolution dans le temps, primes, congés, santé économique de l’entreprise et perspectives, trésorerie, etc. La masse salariale que l’entreprise peut octroyer est également communiquée.
- Pendant la réunion, un premier tour permet à chacun d’exprimer ses aspirations en termes de rémunération, besoins de formation, organisation de son temps de travail… Toutes les demandes sont prises en note et affichées aux yeux de tous et personne n’est autorisé à réagir à ce stade.
- Sur ce, tout le monde part en pause ! L’idée est de laisser une vingtaine de minutes à chacun pour prendre du recul sur les différentes demandes émises, seul(e) ou en petit groupe.
- Tout le monde est ensuite à nouveau réuni pour un 2ème tour de 30 minutes environ. Tous ont alors la possibilité d’exprimer leurs avis, leurs ressentis, de préciser leur demande initiale ou de poser des questions de clarification.
- Un 3ème tour de table permet ensuite à chacun de confirme sa première annonce ou de l’ajuster.
- Enfin, un dernier tour de table est organisé afin d’exprimer si nécessaire un veto sur une ou plusieurs des propositions. Les décisions sont alors actées et un relevé de décision est signé par tous les participants
Et si les résultats de l’entreprise ne sont pas suffisants pour augmenter la masse salariale ? Il est déjà arrivé aux Imfusiens de choisir de réduire leur niveau de salaire pour surmonter une période financière difficile.
Et n’y a-t-il pas un risque de dépasser la limite de masse salariale permettant d’assurer la bonne santé financière de l’entreprise ? Dans la pratique, la somme des demandes n’a jamais atteint le plafond de masse salariale alloué à l’exercice et les Imfusiens n’essaient pas forcément de se répartir le budget restant.
Vous l’aurez compris, les Imfusiens sont pleins de ressources et améliorent sans cesse leur modèle d’entreprise !
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