La CPAM Yvelines s'est transformée... Et maintenant ?

Écrit par Sarah Spitz, le 08 septembre 2019

 

La transformation de la CPAM Yvelines est aujourd’hui une belle histoire à raconter. Par la mise en place d’un Lean management adapté, les collaborateurs ont appris à utiliser des outils simples en toute autonomie. Avec des résultats encourageants, la direction est passée à la vitesse supérieure en mettant en place une plateforme d’innovation participative, qui a donné naissance à plus d’un millier d’idées. En parallèle, une démarche de QVT avec la mise au point d’un baromètre de bien-être au travail a permis de jauger le ressenti des collaborateurs et de désamorcer des tensions larvées entre des managers et leurs collaborateurs. C’est ensuite qu’une autonomie élargie, avec la fixation libre des horaires et congés de plusieurs équipes, a été expérimentée avec succès. L’organisation a ainsi mûri a chaque étape du parcours, mais elle ne se considère pas être arrivée à destination pour autant !

Depuis 2011, un certain nombre d’étapes ont été franchies, des barrières ont été levées, et la confiance a grandi au sein de la CPAM Yvelines. Par exemple, en 2017, la direction a décidé de ne plus contrôler l’usage d’internet. N’importe qui peut aller sur n’importe quel site comme il l’entend. Il s’agit d’une mesure symbolique : rappelons que certaines grandes entreprises vont encore aujourd’hui jusqu’à interdire l’accès à des sites professionnels comme LinkedIn (c'est du vécu, et c'est abominablement pénible) !

La CPAM Yvelines, c’est donc l’histoire d’un formidable parcours : le management bienveillant et exigeant porte ses fruits, la confiance règne. Désormais, les collaborateurs ont les moyens de devenir acteurs de leur organisation, par exemple grâce à la plateforme d’innovation participative ID’Nov. Ils ont également la confiance de leurs supérieurs pour exercer ces moyens. La direction a bien un rôle d’accompagnateur, qui respecte ses engagements en ayant choisi une méthode de transformation cohérente avec les valeurs mêmes de cette transformation : elle repose sur le volontariat, tout simplement parce qu’imposer des initiatives pour libérer la force de proposition des collaborateurs ne serait pas franchement très cohérent. C’est bien parce que la direction incarne les valeurs qu’elle prône que des volontaires se mobilisent.

Si demain, nous avions un nouveau directeur général sans l’envie de poursuivre cette dynamique-là, je ne sais pas… C’est la raison pour laquelle, c’est à nous, maintenant, d’être porteurs de cette dynamique pour donner envie au directeur qui suivra, un jour, de continuer. - Francine, manager

Seule exception à cette règle du volontariat : le débrief des réponses au questionnaire QVT avec son manager, imposé par la direction. Cette exception montre le véritable objectif de cette transformation : faire en sorte que les collaborateurs se sentent bien au travail pour pouvoir libérer leurs énergies. Avec un champ d’action élargi et une Direction qui les met en confiance, les collaborateurs prennent la perche qui leur est tendue, ils osent. C’est ainsi que la culture se transforme : par un changement d’état d’esprit qui découle d’un changement de pratiques organisationnelles au quotidien.

C’est ce qu’indique en tout cas le taux de participation volontaire aux ateliers « Valeurs » organisés en 2018 : 40% des collaborateurs ont décidé d’y aller et « Vision » en 2019, où tout le monde a participé !

Plus que des indicateurs, c’est sans doute l’anecdote suivante qui permet de se rendre compte de la profondeur du changement culturel qui s’est opéré. En octobre 2018, la direction fait appel à l’entraide entre les services. L’activité d’ouverture et de tri des courriers était en retard, et ce tri ne nécessitait pas de compétence bien particulière : n’importe qui au sein de la CPAM pouvait le faire. Mais il fallait le faire rapidement : le délai prévu était de deux semaines ! C’était l’occasion de tester l’état d’esprit « colibri », où chacun apporte sa goutte d’eau*. Un fichier Excel partagé a été mis en place par un petit groupe de travail pour permettre à chacun de s’inscrire au tri. Il s’avère que les agents (issus de différents services) ont été beaucoup plus nombreux que prévu à contribuer, en plus du personnel d’accueil et des techniciens du courrier. Résultat : les dossiers ont été traités en 2 jours au lieu de 2 semaines !

Toutefois, il reste encore un long chemin à parcourir : quand bien même l’état d’esprit du « colibri » aurait infusé dans tous les recoins de l’organisation, la démarche n’en serait pas finie pour autant. Il faut désormais embarquer non seulement les collaborateurs, mais également ceux pour qui la CPAM travaille, les assurés.

Co-construction avec les assurés

En 2017, inspirée par la ville de Nantes, la direction conçoit une plateforme digitale tournée vers l’extérieur, sur le modèle ID’Nov, pour que les assurés s’expriment et proposent les améliorations de services et usages de l’assurance maladie qu’ils souhaitent.

Cette plateforme a été mise en place entre octobre et décembre 2018. Sur cette période, les assurés ont pu y déposer toutes leurs idées. Exactement comme pour la mise en place de l’innovation participative en interne, les arbres à idées ont été dupliqués, cette fois-ci sur les murs des agences de la CPAM. Une autre façon de capter les idées des usagers.

Les assurés ont été atteints via 2 projets différents et complémentaires :

  • Création d’une plateforme permettant le dépôt d’idées en ligne (promotion par une conférence de presse, communication sur le site ameli.fr, page Yvelines, diffusion d’un mail aux assurés ayant accepté l’utilisation de leur adresse mail, diffusion d’une vidéo « draw my life » sur la page Facebook de la CPAM),
  • Participation à la semaine de la transformation publique organisée par la DITP en proposant un atelier / focus groupe en présentielle au siège de la Caisse. Le 26 novembre, un atelier de deux heures a été organisé pour co-construire les actions à mener avec les clients volontaires. Pas moins de 20 assurés participants se sont déplacés.

Mais après tout… Pourquoi embarquer les assurés dans la démarche ? C’est là le cœur de l’approche expérientielle : assurer une symétrie entre l’expérience client et l’expérience collaborateur. Mais pourquoi ? A quoi bon y dédier tant d’énergie ? Sans doute une partie de la réponse réside dans le premier levier de la transformation : le sens. Le client final, l’usager, c’est lui qui donne du sens au travail. Le travail de la CPAM va vers les assurés, c’est donc pour eux qu’ils travaillent. Plus les collaborateurs échangeront avec leurs usagers, plus ils seront exposés à la finalité de leur travail. Ajoutez à cela l’autonomie accordée via le Lean management adapté et la maîtrise des outils et compétences garantie par l’acculturation des managers et la formation continue des agents : vous avez là les trois ingrédients magiques de la motivation intrinsèque selon Dan Pink.

8 ans après le lancement de cette transformation, force est de constater que l’organisation rayonne. La CPAM organise des learning expeditions où différents collaborateurs prennent la parole et montrent leur travail. L’énergie qui s’en dégage est impressionnante : allez-y, et vous ressentirez sans doute vous aussi l’enthousiasme, la fierté, l’authenticité qui s’en dégagent. Quelque chose qui est finalement proche du earnestness, cette sincérité et conscience professionnelle presque enfantine qui est la ressource rare que cherche Sea Smoke Cellars, modèle absolu de l’entreprise libérée fondée par Bob Davids.